Sans viser personne

La perte de la superbe dévoile l’unique conviction de la vacuité et ouvre le couloir qui conduit au néant. Les dalles de ce noir couloir s’égrènent seul, aspiré par ce qu’il reste de la sombre lueur cardiaque qui n’éclaire plus qu’une solitude morne. La route se fait seul et sans viser personne, de tant de lassitude. Et puis viser qui ou quoi, quand la nuit enveloppe des fantômes desséchés sur lesquels le ciel sanglote ? Liquéfié par l'encre noire de la pluie, le cœur de B.B. s'évanouit dans les oripeaux d'un hiver funèbre. Epuisé de mendier la lumière, il quitte les dernières guenilles qu'une brise glaciale jette dans l’oubli. Le ciel dans sa couverture ombrageuse finit de border le lit de pétales de chrysanthèmes qui pleuvent de ses yeux, abandonnant son regard à un océan de vide obscur. Des sentencieuses conclusions de son album noir (« rien de moi ne restera »), et de Qu’est-ce que ça peut faire (« au bout de la route il n’y a qu’un grand désert »), B.B. tire le suc de toutes ses peines lasses dans une chanson qui exhale l’envie d’en terminer, dans le fond et la forme tant verbale que musicale. 

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