Ton héritage

Jusqu’ici B.B. n’avait écrit que sur ses « désamours », sa vision sombre du monde, se vidant de ses larmes et de son sang, irradiant sa vie ou éclairant le monde pour nos yeux qui ne voient rien d’une lumière noire magnifique. Mais ici, et c’est une grande première dans l’œuvre de B.B. qui,  si dans le fond fantasme les mots que sans doute il aurait aimé entendre de la bouche de son père, signe malgré tout dans la forme un témoignage d’une grande lucidité, un texte d’une grande force, un message quasi messianique à sa fille. Dans cet inaugural héritage B.B., passant du statut d’observateur à celui de légataire, révèle à sa descendance la vie d’un homme arrivé au bout de la route dans un texte concentrant tout le déterminisme qui transpirait dans ses précédents albums.

Cette nouvelle intimité grave et profonde se devait d’offrir une place particulière à la voix et au texte et ne pouvait donc souffrir une orchestration grandiloquente, comme la superbe ouverture le l’album. Ainsi la voix de B.B. s’affirme, chantée et assurée comme jamais depuis R.K., et s’habille d’une structure mélodique et orchestrale d’un classicisme certes éculé (thème musical court et récurrent et superposition progressive d’instruments ténébreux et larmoyants qui insufflent une charge émotive croissante et renforcent le poids de ce lourd héritage), mais assez efficace pour en faire un futur grand classique de la chanson française.

Ajouter un commentaire